Ou comment le magazine en quête d’actualité du mercredi 3 décembre 2014, à charge sur l’ostréiculture, vire à la démonstration d’incompétence des journalistes.
Deux choses sont particulièrement odieuses avec ce reportage : les multiples erreurs des journalistes et son habillage scénaristique…
Les erreurs et imprécisions se retrouvent à tous les étages : on y parle d’huîtres mutantes pour les huîtres triploïdes, un qualificatif qui ne veut rien dire et ne sert qu’à faire peur. Autre exemple, La journaliste affirme sans rire que le captage n’est possible que dans deux bassins ostréicoles en France. Une rapide recherche sur Internet lui aurait appris que ceci n’est plus vrai depuis au moins 10 ans : l’Ifremer suit même en routine 5 sites de captage actuellement ! Mais le clou, c’est quand même quand elle parle du bassin d’Arcachon en présentant la carte de Marennes-Oléron…
Plus grave, le ton général du reportage est polémique, du style “on vous ment, nous allons rétablir la vérité”. Le lancement est déjà plus que prometteur, on nous dit ainsi que l’on n’est plus vraiment sûr de ce qu’il y a dans la coquille des huîtres… Et le scénario du reportage est à l’avenant, avec, comme épinglé par un utilisateur d’ostrea, un scénario du bon, de la brute et du truand : trois ostréiculteurs interviewés auxquels le montage fait tenir un rôle. Le but n’est pas ici d’apporter une information éclairante, il s’agit uniquement de raconter une histoire, si possible effrayante, pour le consommateur.
À ce titre, la séquence où les journalistes interviewent des acheteurs d’huîtres sur le marché en les attaquants avec la question “vous savez que vous mangez des huîtres triploïdes ?” est édifiante. Il s’agit ici de faire peur et de recueillir cet effroi devant la caméra. La recette est en effet simple et imparable : prenez un mot scientifique inconnu et dites aux gens qu’ils viennent d’en manger en sous-entendant que ça peut être grave. C’est pratique car ça marche avec tout, à l’exemple de cette dame qui veut tout de suite aller redonner les huîtres qu’elle vient d’acheter, sans d’ailleurs avoir l’air de savoir ce que veut dire triploïde.
La séquence de clôture, où on apprend que les huîtres qui sont servies dans un restaurant d’Arcachon n’ont peut être pas été élevées complètement à Arcachon sent bon le scandale fabriqué. Outre le fait que ce n’est pas une nouveauté, ça devient même un marronnier des médias, le scandale est assez limité : il n’y a pas d’appellation contraignante pour les huîtres du bassin d’Arcachon. Par contre faire passer un ostréiculteur pour un truand ne semble poser aucun cas de conscience aux journalistes.
Ces journalistes nous présentent donc en toute lumière le dévoiement de leur profession, prêts à tordre les faits pour les faire rentrer dans un scandale factice. Il ne s’agit plus là d’informer mais de polémiquer stérilement, en se moquant du fond des problèmes.
Alors un dernier conseil, si vous doutez des huîtres que vous achetez, posez la question à votre ostréiculteur ou votre poissonnier qui vous expliquera peut-être le cycle d’élevage, parfois compliqué, des huîtres mais ne vous en privez pas, d’autant plus que la qualité est exceptionnelle en cette fin d’année 2014 pour des prix stables ou en baisses !
P.S. Je ne peux pas vous fournir de lien vers ce reportage, D8 a au moins eu la décence de ne pas le proposer en replay plus d’une semaine.